“Sans transport, on n’est pas grand-chose, on est pris en otage, on est renfermés dans la maison, entre les quatre murs, puis y a pas grand-chose qu’on puisse faire” (témoignage d’une personne en situation de pauvreté, Montréal, 6 décembre 2019) Les enjeux de planification urbaine et de mobilité ne sembleraient à première vue pas prioritaires dans la lutte à la pauvreté. Pourtant, lors des universités populaires Quart Monde1, les membres en situation de pauvreté du Mouvement ATD Quart Monde2 ont été invité.es à analyser les liens entre mobilité et pauvreté. Leur conclusion est claire : “le transport, c’est un droit essentiel, c’est un droit transversal dans le sens que ça nous permet de réaliser nos autres droits : aller à l’école, à l’hôpital, pour la santé, voir le médecin, travailler, les loisirs, pouvoir manger, faire l’épicerie, et si on n’a pas le transport, les autres droits deviennent inaccessibles si on ne peut pas se déplacer”. Comment alors concevoir la mobilité de demain en ne laissant personne de côté ? Movin’On3, l’écosystème mondial de co-innovation pour une mobilité durable, s’est penché sur cette question en mettant en lien ATD Quart Monde, mouvement international de lutte contre la grande pauvreté, avec des acteurs privés et publics de la mobilité au Québec. Le but de cette initiative : imaginer ensemble comment intégrer l’expérience, l’intelligence et les savoirs des personnes en situation de pauvreté dans la conception des mobilités à venir. Cet atelier qui s’est tenu le 7 mai, a été mené en suivant la méthode du Croisement des Savoirs et des Pratiques4 entre personnes en situation de pauvreté et responsables d’organismes. Il a permis d’identifier les freins et leviers à l’intégration de personnes en situation de pauvreté dans la conception de mobilités durables et inclusives. Parmi ces freins : le peu de demande de la part des actionnaires ou organismes publiques d’inclure les perspectives de ces personnes ; leur difficulté à prendre la parole dans les dispositifs existants de consultation publique ; ou encore l’incapacité des méthodes de collecte de données actuelles à mesurer la non-utilisation des solutions de mobilité par ces populations. Pour lever ces freins, ATD Quart Monde met à disposition sa méthode de « croisement des savoirs » afin de s’assurer que la connaissance liée à l’expérience de ces populations puisse être effectivement partagée. Cette méthode, conjuguée à la volonté des décideurs de travailler de manière plus inclusive, permet d’assurer des initiatives de mobilité pertinentes pour le plus grand nombre. L’invitation est ainsi lancée à chaque organisation d’imaginer, à partir de cette démarche, comment mieux accueillir les expériences et savoirs issus des milieux de pauvreté dans nos consultations, nos prises de décision et nos actions. Les résultats de cet atelier seront diffusés lors du Sommet MovinOn entre le 1er et le 4 juin 2021. Éditorial de Léo Bérenger, publié dans Les Affaires
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